Pourquoi les retours de scène sont cruciaux dans une prestation live ?

Lors d’un concert ou d’un live, le confort des musiciens passe en priorité. L’un des éléments centraux pour garantir leur performance reste la gestion des retours de scène. Un mauvais réglage, c’est des musiciens perdus, un chanteur qui se décale ou un batteur qui s’emballe. Selon une étude de Production Partner, près de 70% des incidents scéniques sont liés à des soucis de retour (source : Production Partner). Rien d’étonnant à ce que toutes les grandes tournées investissent massivement dans ce pan du son.

Le rôle de la table de mixage professionnelle prend ici tout son sens. C’est elle qui donne la flexibilité nécessaire au technicien pour distribuer et personnaliser les signaux vers chaque retour, qu’il soit classique (enceintes de scène) ou intra-auriculaire.

Tour d’horizon des systèmes de retour : quelles options ?

Avant d’aller sur le vif des réglages, il est essentiel de distinguer les différents types de retours utilisés sur scène :

  • Wedges/Enceintes de retour : Les classiques coins de scène. Le signal est envoyé à ces enceintes posées devant chaque musicien.
  • In-Ear Monitors (IEM) : De plus en plus courants, ce sont des écouteurs intra-auriculaires qui permettent une personnalisation poussée du mix de retour.
  • Side-fills : Gros enceintes latérales utilisées sur les grandes scènes pour une diffusion plus large du retour (notamment basse/batterie).

Une récente enquête de Mixmag indique que 55% des groupes professionnels préfèrent aujourd’hui un mix hybride entre wedges et IEM pour combiner sensation live et précision (Mixmag). Le choix se fait selon le budget, le style musical et bien sûr, le matériel à disposition.

Préparer sa table de mixage pour les retours : méthodologie efficace

Tout commence par une bonne organisation du patch. Chaque sortie auxiliaire (AUX send ou BUS) devient potentiellement un circuit de retour. Sur une table numérique de dernière génération (Yamaha QL/CL, Allen & Heath SQ, Midas M32, etc.), on dispose généralement de 8 à 16 sorties AUX, ce qui permet de gérer aisément les besoins d’un groupe complet. Sur une table analogique type Soundcraft GB4 ou Allen & Heath GL2400, le nombre d’AUX disponibles sera plus limité (souvent 4 à 8).

Les étapes clés lors du patch et du soundcheck

  1. Numéroter et identifier chaque AUX : Affecter dès le départ chaque AUX à un musicien ou à une zone de la scène.
  2. Vérifier les branchements : Un câble mal inséré, un patch inverti et c’est une perte de temps phénoménale lors de la balance.
  3. Préréglage du gain : Avant de travailler les retours, régler les gains d’entrée pour disposer d’une réserve de niveau sans saturation ni bruit de fond.

Certains pros optent pour la création de scènes/mémoires dans la table (sur modèles numériques), ce qui autorise un rappel immédiat des réglages d’un concert sur l’autre. Un atout… sauf si le line-up change sans prévenir !

Gestion des retours : techniques de mixage pour une scène efficace

Un retour bien mixé, c’est avant tout la compréhension des besoins de chaque musicien. Un chanteur aura besoin d’entendre sa voix au-dessus de tout, le batteur voudra la basse et le click, le guitariste surtout son ampli. Pour cela :

  • Préférer les départs pré-fader (pré-EQ) pour les wedges, évitant ainsi que les modifications du mix façade n’affectent les retours.
  • Pour les in-ear monitors, certains mixeurs aiment utiliser des départs post-EQ, afin que le musicien bénéficie du même traitement sonore qu’en façade.
  • Limiter le nombre de sources dans chaque mix de retour : trop d’informations, c’est illisible, surtout en wedge. Conserver les éléments essentiels.

Anecdote : lors d’un festival, plusieurs fois j’ai vu des artistes réclamer plus de "tout" dans les retours. Mauvaise idée ! Résultat, le mix devient brouillon et le repère auditif disparait. Privilégier toujours la clarté sur le volume.

Que faire en cas de larsen ou de bruits parasites ?

Le larsen est l’ennemi numéro un du retour de scène. Pour l’éviter :

  • Soigner le placement des wedges, de préférence alignés avec l’axe le moins sensible du micro utilisé (relire les diagrammes polaires des micros, notamment les SM58, SM57 ou Beta58A de Shure).
  • Égaliser chaque retour en utilisant les égaliseurs paramétriques sur les AUX ou un égaliseur graphique inséré : atténuer entre 2 kHz et 4 kHz là où les larsens surgissent souvent.
  • Limiter le niveau de retour à ce que l’artiste peut réellement exploiter.

Astuce : beaucoup utilisent aujourd’hui des analyseurs RTA intégrés à la table de mixage numérique pour repérer visuellement les fréquences problématiques. Les modèles Allen & Heath dLive et Yamaha QL disposent de telles fonctions intégrées.

Processus avancés : traitements de dynamique et personnalisations

Sur les grosses productions (tournées, plateaux télé, festivals), l’usage de traitements dynamiques sur les circuits de retour devient indispensable, notamment :

  • Compression sur les retours de voix, pour éviter les écarts de niveau déstabilisants.
  • Gate/expander sur batterie pour éviter la repisse inutile des cymbales dans le retour du chanteur par exemple.
  • Limiteur sur chaque sortie retour pour éviter d’endommager les oreilles (particulièrement en in-ear monitors : l’OMS français recommande de ne jamais dépasser 85 dB SPL en écoute prolongée, source : ameli.fr).

Les tables de mixage numériques modernes facilitent grandement ces traitements en les intégrant sur chaque aux send, alors que sur une console analogique, il faudra insérer ces processeurs physiquement, via patchbay.

L’importance de la communication avec les musiciens

Un aspect souvent sous-estimé : la communication directe avec les artistes pendant la balance. Avoir un talkback et un micro d’intercom directement lié à la console permet de recevoir les retours (sans mauvais jeu de mot) en temps réel.

  • Prévoir des repères simples ("plus de chant au retour 3", "moins de basse sur le wedge du batteur"),
  • Avoir une check-list écrite à côté de la table (utile quand la pression monte),
  • Proposer à chaque musicien un temps pour affiner ses réglages.

À noter : sur de nombreux logiciels de contrôle à distance (comme QMix-UC de PreSonus ou Mixing Station pour Midas/Behringer), chaque musicien peut ajuster son retour depuis son smartphone ou tablette, ce qui accélère la phase de soundcheck et responsabilise l’artiste sur son propre mix.

Cas pratique : une journée type de réglages retours sur une scène

Voici comment se déroule souvent la création des retours lors d’un événement live, à grande échelle :

  1. Repérage technique : la scène est montée, repérage des positions de chacun et branchement des wedges/IEM.
  2. Patch de la table : annotation des AUX, coloration pour chaque musicien (ex : couleur bleue pour le chant, verte pour la batterie…).
  3. Check micro par micro : vérification que chaque source part bien dans les retours voulus, en volume nominal.
  4. Premiers réglages de mix : niveaux, panoramique (notamment pour les IEM stéréo), égalisation de confort sur chaque sortie.
  5. Phase de balance : l’ensemble du groupe joue, chaque musicien demande ses ajustements, l’ingé-son ajuste les AUX concernés.
  6. Sauvegarde des réglages (numérique) pour le rappel rapide en concert.
  7. Vérification finale larsen & traitement dynamique avant l’arrivée du public.

Fun fact : lors du Hellfest 2023, chaque plateau a vu passer plus de 40 groupes en trois jours, avec des techniciens capables de reconfigurer intégralement les retours en moins de 12 minutes entre les sets (source : hellfest.fr). Cela montre à quel point la préparation et la méthode sont essentielles.

Pièges à éviter et astuces pro

  • Ne jamais négliger l’état des câbles ou des DI box (boîtes de direct) : un faux contact, c’est un retour qui disparaît et un musicien en panique.
  • Prendre quelques minutes pour enregistrer les réactions sur scène (un smartphone suffit) lors de la balance permet d’analyser après coup les éventuels points faibles du mix de retour.
  • Toujours avoir un casque et une sortie PFL sur la table pour écouter chaque retour individuellement (et isoler un souci en deux secondes).
  • Anticiper le changement d’instruments ou de musiciens qui peut modifier complètement les besoins (un guitariste solo n’a pas les mêmes attentes que s’il joue en backing).
  • Prévoir une solution de secours en cas de panne d’un IEM (wedge de backup, casque filaire)… Nul n’est à l’abri d’un système sans fil capricieux.

Aller plus loin dans la gestion des retours : innovations récentes et applications à connaître

Parmi les tendances récentes, l’intégration de l’IA pour le réglage automatique des égalisations anti-larsen fait son apparition. Des marques comme dbx ou Behringer proposent des modules capables d’analyser la scène en temps réel pour supprimer les fréquences problématiques, ce qui diminue drastiquement les incidents sonores en live.

  • Les consoles remotely controllables : plus besoin d’être vissé à l’arrière de la scène ; une tablette ou un ordinateur permet de circuler, écouter et ajuster au plus près des artistes.
  • Mixage personnel : des systèmes comme Allen & Heath ME-1 ou Behringer P16 permettent à chaque musicien de régler en direct son propre retour à partir d’un mini-mixeur dédié. Fini les incompréhensions, place à l’autonomie.

Sur le marché français, plus de 30% des prestataires de sonorisation investissent aujourd’hui dans de tels dispositifs pour des événements récurrents comme les salles de concert municipales (source : lasonotheque.org).

Optimiser chaque concert : pour finir

La gestion des retours de scène peut transformer du tout au tout l’expérience d’un concert, tant pour les musiciens que pour le public. Un bon retour, c’est la clé d’un jeu précis, d’un groove cohérent et d’une prestation sans stress. Les progrès récents des tables de mixage professionnelles, combinés à l’écoute des besoins de chaque membre du groupe, permettent de booster la qualité globale du son sur scène – un facteur qui pèsera de plus en plus dans le live du futur.

En affinant chaque aspect — de la préparation technique à l’utilisation des innovations logicielles ou matérielles — chaque événement sera l’opportunité de progresser encore et d’offrir une meilleure expérience à tous.

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